Un article de Michael Hall sur les styles cognitifs qui animent la stratégie politique de Donald Trump
Votre manière de penser détermine votre façon de parler et d’agir. Nous le savons et, aussi étrange que cela puisse paraitre, nous avons aussi tous tendance à l'oublier. Nous l’oublions car nous sommes captés par le contenu des propos et des actes d'une personne, en oubliant que cela est le produit de la pensée de cette personne. Nous réagissons à ce qui est dit ou fait en supposant savoir ce que cela désigne: cela signifie (pour nous) que c’est la signification qu’on aurait attribué si nous avions dit ou fait cette même chose. Nous appelons cela de la «projection». Pourtant, malgré cette immersion dans le contenu des mots et des actions, ce qui est dit et fait dépend bien des schémas de pensée de la personne.
Dans ces deux modèles, nous disposons de nombreuses distinctions. 60 méta-programmes (voir Figuring Out People, 1997) et 22 distinctions du méta-modèle (voir Communication Magic, 2001). Dans l'expérience de la vraie vie, nous avons tous une configuration particulière de ces dernières distinction, et un ensemble (ou groupe) de ces distinctions composent un schéma plus large, ou un syndrome. De nombreuses variables sont donc présentes dans la modélisation d'un expert. Nous allons donc les appliquer aux différentes façons de caractériser ceux qui réussissent dans le monde des affaires, de la politique, et des médias.
La pensée politique est généralement une pensée "prudente". Avec la peur d’offenser les individus, le langage des politiques a tendance à dégénérer en un langage «politiquement correct». Les politiciens pensent comment les autres pourraient ou pourraient mal interpréter les propos. Par prudence, ils analysent les mots et parlent avec suffisamment d’imprécisions pour que rien n’ait l’aspect du tranchant. Les politiciens sont très conscients du danger qu’il y a à ne pas être apprécié et à subir une mauvaise presse, et ils travaillent dur pour éviter ces dangers. Ils peuvent aussi parler avec des mots vides. Il est fréquent d'entendre un politicien parler avec l’impression que ce qu’il dit fait sens, puis se rendre compte par la suite qu’avec tous ses mots, il n’a dit rien. Les politiciens se livrent souvent à ce que nous appelons le maquillage. Ils racontent une histoire de façon à ce qu’elle sonne à leur avantage et dans laquelle ils masquent les choses. Pensez à Richard Nixon ou Bill Clinton. Quand la politique va mal, ils adoptent alors une attitude très partisane et le favoritisme se dégrade en népotisme. Dans le monde politique, les choses sont souvent en noir ou blanc, tout ou rien, et soit vous gagnez l'élection soit vous la perdez.
Le mode de pensée du monde des affaires est orienté « action », pour que les choses soient faites. Après tout, les affaires ne réussissent que si elles créent des produits, des services et des informations qui répondent à un besoin et pour lequel les gens sont prêts à payer. Dans le monde des affaires, le feedback du marché est rapide, et ceux qui réussissent savent écouter et faire les ajustements nécessaires. Ils doivent suivre le rythme du changement, regarder ce qui se passe sur les marchés, et être suffisamment souple pour être prêt à changer. Les patrons de petites entreprises et les entrepreneurs savent que l'argent investi est le leur. Donc, ils sont économiquement plus compétents et disciplinés. Dans le monde des affaires, la pensée des entrepreneurs qui réussissent se caractérise avant tout par la droiture, l’honnêteté, un côté direct pour dire ce qu'ils ont à dire et sans mâcher leurs mots, et une capacité à penser grand. C’est la pensée qui caractérise Richard Branson, Warren Buffet, Jack Welch, etc. La pensée des affaires est généralement une question de degré et non de tout ou rien. La question est la suivante : «De combien de clients avons-nous besoin pour réaliser un profit?" Quand les affaires vont mal, il y a de la corruption, du vol, des détournements de fonds, opérations malhonnête, etc.
Le mode de pensée du monde du divertissement et du marketing est centré sur une « attention » d’un public à capter. L'important est ce qui capte l'attention, ce qui est immédiat, fort, lumineux, extrême, volumineux, souligné, ce qui implique de gagner/perdre, ou la célébrité, etc. Cette pensée se focalise également sur la réalisation d’une promesse, car si toutes les étincelles et l'énergie déployée ne génèrent pas la marchandise promise, le public va fuir et aller voir ailleurs. Le demi-tour à faire est court et rapide.
Maintenant, imaginez une personne célèbre dans le monde des affaires faisant son entrée dans celui de la politique! Cela ne va t-il pas être sauvage? Eh bien, c’est ce que nous avons aujourd'hui aux États-Unis dans les campagnes politiques (dans les primaires pour les élections présidentielles). Regardez les campagnes actuelles américaines et écoutez les débats politiques, les candidats de «l’établissement» (Hillary pour le côté démocratique et Bush, Kasich, Rubio, etc. pour le côté républicain) ne semblent pas être en mesure de comprendre Bernie Sanders (côté démocrate) et Donald Trump (côté républicain). Ils n’y arrivent pas. Pourquoi? Car ces derniers possèdent un style de pensée fort différent, et les politiques de « l'établissement » ne semblent pas avoir la flexibilité nécessaire pour imaginer penser en dehors de leur cadre habituel, en « en dehors de la boîte. »
Bien sûr, la personne qui se distingue vraiment est Donald Trump. Il combine de façon unique la pensée des affaires et celle du divertissement. Il semble aussi comprendre la structure de la pensée politique et la viole de façon intentionnelle. Il ne se contente pas de l'éviter, il cherche à la violer et à utiliser ces violations pour son marketing. Pour comprendre la façon dont il pense, on peut se référer à son livre de 1987, The Art of the Deal. Ce que je trouve étonnant est que presque tout ce qu'il fait aujourd'hui, a été décrit dans son livre il y a quelque 29 ans. Si vous ignorez qu'il est stratégique dans ce qu'il fait, vous allez probablement penser qu'il est comme un bolide, drôle ou mal informé, etc. Mais après ma nouvelle lecture du livre, je pense que Trump poursuit une intention, que tout est planifié, et qu’il est très stratégique dans sa manière de faire.
A propos de sa pensée politique: "C’était un homme politique, et il voulait connaître la direction du vent avant de prendre position." (108) ; «J'ai découvert que les politiciens ne se soucient pas trop de ce que les choses coûtent. Ce n'est pas leur argent. "(111); "Evoquer la possibilité d’une mauvaise presse, même dans une obscure publication, et la plupart des politiciens sautent." (306); "Le pire de tout, est que personne dans l’administration bureaucratique de la ville n’est tenu responsable d’un échec. ... Vous ne récompensez pas l'échec par la promotion de ceux qui en sont responsables, parce que tout ce que vous obtiendrez est plus d'échec. » (322-323)
A propos de la pensée d'affaires : «J'aime penser grand. Je l'ai toujours fait. Pour moi, c’est très simple: si vous êtes en train penser, autant penser grand "(46).; «Je n'étais pas satisfait par l’idée de seulement gagner ma vie. Je suis là pour construire quelque chose de monumental. ... Ce qui m'a attiré était le défi de la construction d'un développement spectaculaire ... "(47). "Pour penser grand, l'une des clés est de se concentrer totalement."; «Je suis un homme d'affaires, et j'ai appris une leçon de cette expérience: une bonne publicité est préférable à une mauvaise, mais dans une perspective d’un compte de résultat, une mauvaise publicité est parfois préférable à l’absence de publicité. En bref, la controverse fait vendre. Ainsi, il s’avère de faire glamour ". (176)
A propos de la pensée à long terme: «J’étais préparé à être patient et persévérant, et autant que je devais l’être." (252); A propos de la réflexion stratégique: "Vous ne pouvez pas agir sur un coup de tête, même envers un organisme de bienfaisance, sauf si vous avez envisagé une baisse (264)
A propos de la négociation et de la conclusion des accords :"La meilleure chose à faire est de passer en force, et l'effet de levier est la plus grande force que vous pouvez avoir. L'effet de levier est d'avoir quelque chose que l'autre gars veut ". (53) «Je suis très dans la compétition et je vais à peu près tout faire dans les limites légales pour gagner." (108) ; "Il y a des moments où vous devez être agressif, mais il y a aussi des moments où votre meilleure stratégie consiste à vous allonger." (223) ; "Je me bats quand je sens que je suis en train de merder ..." (236) ; "Les deals fonctionnent mieux quand chaque côté obtient quelque chose qu'il veut de l'autre côté." (335)
A propos de la pensée marketing: "Une chose apprise sur la presse est qu'ils sont toujours avides d'une bonne histoire, et plus elle est sensationnelle, mieux c’est. C’est dans la nature du job... Si vous êtes différent, quelque peu scandaleux, ou si vous faites des choses qui exagérées ou controversées, c’est que vos offres ont tendance à être ambitieuses. "(56) ; «Quand je parle avec des journalistes je suis direct. Je tente de ne pas les tromper ou de ne pas être sur la défensive, parce que c’est ainsi précisément que la plupart des gens se mettent dans le pétrin. "(57) ; «La façon dont je fais la promotion est par la bravade. Je joue avec les fantasmes des gens. ... Un peu d’hyperbole n'a jamais fait de mal. "(58) "... Je comprends maintenant que certains événements peuvent prendre une importance symbolique." (175)
A propos du Leadership: «Le leadership est peut-être la clé pour obtenir que tout travail soit fait. Il n'y avait pas un seul jour sans vérification des progrès réalisés. La plupart du temps, je me rend personnellement sur le lieu de travail"(316)
Comprendre la pensée de Trump
La combinaison des modèles de pensée des affaires et du divertissement, révèle un aspect dominant du discours de Trump, celui de la grandeur. Il est plus grand que la vie et sa vision est plus grande que la vie. Alors il commence en exagérant, en utilisant des «quantificateurs universels», en clamant des choses qui captent votre attention, en prenant la presse de court et en dominant l’actualité. Quand il fait cela, il est en plein dans le « divertissement » et le «marketing.» Puis, quand il un média excité autour de lui qui le bombarde de questions, il tempère ses déclarations.
Les politiciens des deux bords ne comprennent pas. Ils analysent chaque mot, déclenchent une campagne contre ces mots, pendant que Trump est déjà à la prochaine étape en train de contrôler le cycle des médias! En fin de compte, il "définit le cadre" ou contrôle l'agenda des médias alors que les autres lui tournent autour en essayant de l'utiliser à des fins politiques. Mais cela ne semble pas fonctionner. Il s’amuse, dit plein de choses en plaisantant et parce qu'ils (les autres politiciens) sont si graves, ils finissent par devenir stupides dans leurs contre-attaques.
En cela, il pense à l'image plus grande, la stratégie à long terme, et ils (autres politiciens) sont coincés dans une pensée court terme. Ils pensent que sa «mauvaise presse», du fait de ses déclarations scandaleuses, provoqueront sa fin. Mais il embrasse la mauvaise presse et l'utilise pour ce qu’elle vaut ; les autres politiciens ont peur d'être politiquement incorrect. Il embrasse l’incorrection politique et creuse son trou pour avoir toute la publicité qu'il peut obtenir.
Lors des shows TV "The Apprentice" et "Celebrity Apprentice" il a démontré qu'il comprend parfaitement comment construire un drame, capter l'attention, créer du suspense pour marquer des points. Maintenant, ses spectacles s’apparentent à des foires commerciales. Quel ennui, mais ce show a fait une audience jamais égalée. Les autres personnages politiques ne comprennent pas, de même que les médias. Ils disent de lui que c’est un clown, un showman, un sauvage, un homme dangereux, et Trump aime cela. Le jeu est entre ses mains, pour obtenir encore plus d'attention et l’écoute de foules encore plus grandes. Les gens s’accordent pour voir quelle chose scandaleuse il va dire! Pendant ce temps les candidats de l'établissement se plaignent qu'ils n’obtiennent pas assez de temps d'antenne.
Pourtant, derrière tous ce divertissement se trouve un homme d'affaires qui regarde les choses à travers le prisme du coût, de la productivité, des résultats et de l'efficacité. Comment cela va se terminer, qui sait? Il n'y a pas de prédiction à faire, nous avons juste à attendre de voir. Pourtant, jusqu'à présent, Trump a certainement été celui qui change les règles du jeu en politique. Il enfreint toutes les anciennes règles du jeu politique et a apporté un nouveau souffle à l'ensemble du processus.
Notes : J’ai écrit ceci la semaine dernière (février 2016) et avant le boycott de Trump du débat de ce soir. Mon avis est qu'il est, encore une fois, en train de gérer sa campagne. C’est risqué, c’est en dehors des modèles politiques auxquels les gens ont pensé, et c’est absolument fascinant de voir ce qui adviendra de lui. D’un point de vue psychologique et neuro-sémantique c’est une pensée et un cadrage très différent! Et c’est certainement, "celui qui définit le cadre qui contrôle le jeu."
Traduction : Jean Luc Monsempès
Source : Meta Reflections #6, January 28, 2016, The Psychology of Politics. Article en français traduit avec l'autorisation de son auteur.
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L'auteur : Michael Hall, Ph.D. Neuro-Sémantique Directeur exécutif Neuro-Sémantique international
P.O. Encadré 8; Clifton, CO 81520 USA 1 970-523-7877 E-mail de M. Hall: Meta@acsol.net
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